Légalisation du cannabis : un nouvel espoir

Ce 24 août 2021, les consommateurs de cannabis regardent la télé d’un air morne. Encore une déclaration de Gérald Darmanin. “Une défaite morale” que la légalisation, dit le ministre de l’Intérieur sur France 2. Ailleurs, des pays -l’Allemagne, de nombreux Etats américains, l’Espagne, le Luxembourg, l’Italie…- atteignent la légalisation, la dépénalisation ou au moins l’usage thérapeutique à grande échelle… Mais en France, niet. C’est la “défaite morale”.

Et pourtant, 2021 est aussi l’année d’un nouvel espoir. Une nouvelle route vers la légalisation… Plutôt un chemin, un raidillon même, avec le vide des deux côtés. Le genre de chemin où on n’est pas sûr d’arriver avant d’être arrivé.

C’est sur ce genre de sente que Nicolas Hachet, avocat bordelais, s’est lancé pour que peut-être, enfin, par la grâce du Christ (qui fumait certainement), le cannabis soit légalisé en France.

Certaines modifications juridiques ont eu lieu ces dernières années. Des petits changements qui vont peut-être accoucher d’une grosse différence. Concrètement, Nicolas Hachet œuvre pour qu’une partie de l’article du code de la santé publique (L.5132) qui pénalise le cannabis soit déclarée contraire à la Constitution.

L’avocat a déposé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) devant le Conseil Constitutionnel, l’instance chargée de vérifier la conformité de tous les textes à notre belle Constitution de 1958, fondatrice de la Vème République.

Nicolas Hachet va affronter les Sages du Conseil constitutionnel le 14 décembre, pour une plaidoirie. 

Il représente officiellement quatre associations, et 13 prévenus dans des affaires de cultures et d’usage de cannabis. Et officieusement… des millions de consommateurs français plus ou moins réguliers. 11% des adultes en absorbent occasionnellement dans l’année et 3,2% au moins 10 fois par mois (1). C’est aussi un marché à plusieurs milliards d’euros qui se joue peut-être face aux Sages…

Allié inattendu, le Covid a aussi aidé, à sa manière. “J’ai passé le confinement à bosser sur la question”, sourit Nicolas Hachet à Botanik Store. Il a rédigé un mémoire, disponible en ligne.

Enfin, pour les revendeurs de CBD, la décision du Conseil Constitutionnel pourrait forcer le pouvoir législatif à pondre un texte positif. Car pour l’heure, c’est seulement une jurisprudence européenne (Cours de justice de l’UE, arrêt du 19 novembre 2020) qui autorise la circulation et la vente de CBD en France. Et déjà, certains esprits tordus réclament l’interdiction des fleurs… pour faciliter le travail de la police. La maréchaussée aurait du mal à différencier le cannabis avec THC du cannabis sans THC…

Alors comment l’avocat compte-t-il s’y prendre pour faire déclarer ce fameux article du code de la Santé contraire à la Constitution ?

Le texte se heurterait aux articles 34 de la Constitution du 4 octobre 1958 et à l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Ces deux magnifiques écrits rappellent, tout bêtement, que c’est la loi qui doit fixer les peines et que toutes les peines doivent être nécessaires. “Seul le législateur a le droit de restreindre les libertés individuelles”, résume Nicolas Hachet.

Nicolas Hachet a alors ouvert deux fronts.

Le premier s’appuie sur un fait simple : en matière de cannabis, ce n’est pas la loi française qui fixe les peines. C’est un arrêté ministériel. Et c’est ce “format juridique” qui ferait un pli dans la Constitution.

Explications… avec un peu d’histoire. La politique répressive des drogues en France remonte, en gros, à la loi du 31 décembre 1970. Ce texte de la Saint Sylvestre encadre “l’importation, la production, la fabrication, ou l’exportation illicites des substances ou plantes classées comme stupéfiants,” dans le code de la Santé publique. Et c’est le code pénal qui fixe les peines.

Mais chose surprenante, aucun des textes ne désigne quelles substances sont des drogues ou lesquelles n’en sont pas. Un peu comme si vous aviez un mode d’emploi mais que vous ne sauriez pas à quel appareil l’appliquer. 

Alors, comment savoir si le savon de Marseille ou le cannabis sont des drogues (aux yeux de la justice) ? En fait, le ministère de la Santé prend un arrêté -un arrêté n’est pas une loi- “sur proposition du directeur général de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM)”, stipule le code de la Santé publique. Et sur quoi se basent ce ministère et l’ANSM ? Sur la Convention unique sur les stupéfiants du 30 mars 1961, adoptée sous l’égide de l’ONU, et ratifiée par la France. 

Aujourd’hui, ce front progresse. “On a déjà remporté une petite victoire”, clame Nicolas Hachet à Botanik Store, avant même le verdict du Conseil Constitutionnel. En effet, ce 24 novembre, la Cour de Cassation a accepté de transmettre la QPC au Conseil Constitutionnel, sur le fait que c’est le pouvoir réglementaire qui fixe les peines et non le pouvoir législatif. 

Et chose amusante, c’est la question du CBD, du cannabis sans THC, qui a ramené, sur le devant de la scène, la question du cannabis avec THC.

Car c’est un autre arrêté, celui du 22 août 1990 -et toujours pas une loi- qui décide de quel cannabis est stupéfiant ou non, lequel est industriel ou non. Le chanvre industriel ne comprend que les graines et les fibres, avec moins de 0,2% de cannabis.

En 1990, le CBD étant inconnu, la question ne se posait pas. Mais depuis l’essor de la divine molécule, les choses ont changé. Interrogée sur le CBD, “la Cour de justice de l’Union européenne a considéré (…) que seuls les produits pouvant créer un risque pour la santé publique sont susceptibles d’être classés comme stupéfiants”, explique un juriste (2) dans un article du 2 décembre. Donc le CBD n’est pas un stupéfiant. 

Mais cette décision européenne pose du coup un souci en France. “La loi ne fixant aucun critère pour distinguer ainsi cannabis licite et cannabis illicite, le Conseil constitutionnel devait fort logiquement finir par être saisi de la question”, poursuit le juriste.

Et le second front vise le régime répressif applicable au cannabis. Lui aussi serait, aux yeux de Nicolas Hachet, inconstitutionnel.

L’avocat se base sur les deux mêmes articles de la Constitution.

De nouveau, voici pourquoi il y aurait un conflit constitutionnel. 

Le 24 décembre 2019, veille de Noël, il s’est produit une petite révolution. Une magnifique loi, sans doute votée par une Assemblée nationale pleine à craquer en cette veille de fête, autorise l’usage médical du cannabis sous certaines conditions.

Et un peu moins d’un an plus tard, le 2 décembre 2020, il s’est produit une autre petite révolution. L’herbe est passée de la catégorie IV à la I dans la fameuse Convention de l’ONU sur laquelle s’appuie le ministère et l’ANSM pour classer le cannabis comme un stupéfiant illégal. Le texte reconnaît désormais son usage thérapeutique, même si le cannabis demeure un stupéfiant.

Cette double évolution fait que le cannabis peut désormais être considéré comme un médicament. Donc, pourquoi ne pas lui appliquer le régime répressif en vigueur pour les médicaments ? Pourquoi continuer avec les peines, bien plus lourdes, prévues pour les stupéfiants ? 

Là encore, le législateur n’a pas tranché. C’est toujours le pouvoir réglementaire, ministériel, qui décide. Donc, là encore, Nicolas Hachet attaque la constitutionnalité d’une telle pratique.  “Je dis que mes clients ont cultivé du faux cannabis thérapeutique”, résume l’avocat.

En outre, Nicolas Hachet va plaider le fait que le cannabis n’est pas plus dangereux que d’autres médicaments dont l’usage illégal relève d’un régime répressif moins dur. Donc il n’y aurait pas nécessité d’infliger des peines plus lourdes pour le cannabis. Donc le régime répressif du cannabis serait donc inconstitutionnel aussi au titre de l’article de la Constitution sur la nécessité des peines.

“La sévérité des peines applicables au trafic de médicaments à base de cannabis apparaît disproportionnée au regard de l’infraction”, résume Nicolas Hachet à Botanik Store. Par exemple, “si vous vendez du Tramadol ou du Subutex dans la rue, ou que vous en prenez accompagné de quelques bières 8-6 comme c’est la coutume, et bien vous risquez moins que si vous faites pareil avec du cannabis”, regrette-t-il. 

Enfin, Nicolas Hachet affirme qu’il n’y aurait pas lieu de différencier les peines entre les auteurs des infractions en rapport avec des médicaments et ceux qui usent de cannabis illégal. Le régime répressif serait donc aussi contraire à l’article de la Constitution qui pose le principe d’égalité devant la loi. (article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789)

Quelles solutions se présentent au Conseil Constitutionnel ? 

“Le Conseil constitutionnel risque de donner une injonction au pouvoir législatif de faire une loi, avec un délai, explique Nicolas Hachet. Mais sans doute après les élections présidentielles, vu les débats que ça va provoquer…”

Les Sages pourraient aussi décider de continuer à appliquer la loi actuelle, en attente de la prochaine. Mais si le Conseil Constitutionnel déclare inconstitutionnel l’article du code de la santé publique, on peut se demander si les condamnations sur la base de cet article seraient légales dans l’intervalle de temps… 

La route reste encore longue pour qu’en 2022, la France légalise l’herbe qui aurait poussé sur la tombe du Roi Salomon au Xème siècle avant JC. Le pouvoir législatif pourrait tout aussi bien pondre une loi qui pénalise encore plus le cannabis. “Mais je n’y crois pas, rassure Nicolas Hachet. Pas après les avancées dans tous les autres pays…”

All you weed is love…

  1. Les niveaux d’usage de cannabis en France en 2020, OFDT, Décembre 2021
  2. Yann Bisiou, maître de conférences à l’Université Paul Valéry de Montpellier 3, dans un article du 2 décembre 2021.
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2 comments

  1. 24 mai 2021 at 21:46
    Greta Tolbert

    Je m’appelle Gina Marshal, voici une brève histoire sur la façon dont l’huile de cannabis RSO a guéri mon cancer.J’ai 68 ans, février 2021, on m’a diagnostiqué un cancer du foie et de la tumeur, dont j’ai perdu tout espoir, jusqu’à ce qu’un ami me présente aux traitements au cannabis auxquels je n’avais jamais cru.Mais j’ai dû l’essayer et quelques mois après avoir été totalement guéri et que cette huile de cannabis a tué mon cancer, Rick Simpson m’a aidé avec cette huile de cannabis.Vous pouvez le contacter Ricksimpsonmedicaloil@ outlook.com

    Meilleures salutations,
    Gina Maréchal

  2. 5 octobre 2021 at 23:39
    Michel Hourmant

    Bonjour,
    J’ouvre une boutique de cbd et je suis intéressé par vos cosmétiques.
    Pourriez-vous me contacter pour recevoir votre catalogue pro ?
    Belle journée et cordialement,
    Michel Hourmant

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